Interview de Miguel Martinez

(VTT)

En 2000, il est devenu champion Olympique de VTT Ă  Sydney. Lors des Jeux Olympiques d’Atlanta, quatre ans plus tĂ´t, il avait remportĂ© le bronze. Egalement champion du monde, Miguel Martinez est l’une des grandes figures du sport français. Aujourd’hui âgĂ© de 40 ans et toujours coureur de haut niveau, il revient pour nous sur les grands moments de sa carrière.

Miguel, tu as remporté ta première médaille Olympique à l’âge de 20 ans avec le bronze du VTT en 1996 à Atlanta. A l’époque, cette médaille était-elle une surprise pour toi ou bien un objectif clair en arrivant ?

Je n’avais que 20 ans mais c’était un objectif. J’avais été vice-champion du monde l’année précédente. Quand j’ai participé aux Jeux Olympiques d’Atlanta, j’étais leader de la Coupe du monde et j’avais remporté les trois dernières manches de Coupe du monde. Je partais donc pour être champion Olympique ! Mais deux autres coureurs ont été plus forts le jour J. Ils n’avaient pas couru le dernier mois pour mieux se préparer pour les JO. Normalement, j’étais plus fort qu’eux !

Tu es ensuite devenu champion Olympique en 2000 à Sydney. Raconte-nous comment tu as vécu cette course de l’intérieur ? A quel moment as-tu senti que tu allais gagner ?

J’avais fait tellement de travail spécifique et intense, et j’avais été champion du monde l’année précédente. Du coup, quand j’ai atterri à Sydney, je sentais mentalement que j’allais gagner !

Lors de la course en elle-même, j’avais un adversaire très fort : le Belge Filip Meirhaegue. J’ai joué ma course par rapport à lui. Un Suisse est parti à l’avant, Filip Meirhaegue est revenu sur lui, et je l’ai contré. J’ai alors pris quelques secondes d’avance, qui m’ont permis d’aller jusqu’à l’arrivée.

Dans le dernier tour, d’un côté on veut assurer une médaille et être au moins troisième, et d’un autre côté on veut gagner. Sur le dernier kilomètre, quand j’ai vu les caméras de l’arrivée qui me filmaient, j’ai senti que la victoire était proche. J’ai pensé à ma famille et à tous les gens qui m’entouraient et me regardaient. Cette caméra devenait comme des yeux, comme si c’étaient eux qui me regardaient. Je me souviens de ça. C’était vraiment une sensation énorme de gagner la plus grande course planétaire et de savoir qu’ils me regardaient !

La période d’après-titre Olympique a-t-elle été difficile à gérer ? Etais-tu préparé pour toutes les sollicitations qui ont suivi ?

Il y a eu pas mal de sollicitations. J’étais jeune et je laissais mon manager gérer tout ça. J’ai un peu de regrets car j’aurais pu mieux faire au niveau des relations publiques. Je n’ai jamais été rassasié au niveau des victoires et après mon titre Olympique à Sydney, j’en voulais encore plus. Je n’ai donc pas su profiter au maximum de ce très fort engouement médiatique. J’ai continué à être très sérieux, au détriment des sponsors et des medias.

En 2002, tu as tenté une carrière sur route et tu as même participé au Tour de France, sous les couleurs de l’équipe Mapei Quick Step. Quels souvenirs gardes-tu de cette expérience ?

Aller sur route était un rêve que j’avais dans ma tête depuis très longtemps. C’était exceptionnel de passer professionnel dans la plus grande équipe au monde de l’époque et en plus d’avoir la chance de participer au Tour de France. J’ai réalisé une très belle saison pour ma première année. Mais c’était un changement assez brutal par rapport au monde du VTT. Je me suis adapté, parce que j’avais l’envie vis-à-vis du cyclisme sur route, mais je voyais bien que ça allait très vite et que j’allais peiner à faire quelques résultats.

En 2004, tu as de nouveau participé aux Jeux Olympiques à Athènes, mais tu as abandonné. Avec le recul, as-tu des regrets d’avoir essayé une carrière sur route et de n’avoir ainsi pas pu préparer de façon optimale la défense de ton titre Olympique ?

Selon moi, sans une déchirure musculaire, j’aurais pu gagner ou terminer deuxième derrière Julien Absalon. En fait, j’attendais depuis très longtemps un nouveau vélo pour les Jeux Olympiques. Il est arrivé en retard, et je me suis rendu compte juste avant les Jeux qu’il était trop petit. Je suis donc parti aux Jeux Olympiques avec une tendinite.

A mi-course, je suis passé en tête. Mais il faisait chaud et je me suis déshydraté. J’ai alors eu deux déchirures musculaires au niveau des jambes. Je n’arrivais même plus à pédaler. J’étais bien parti mais j’ai perdu la médaille. C’était pour moi une grande déception ! J’en ai pleuré !

Je pense que tout cela n’est pas dû au fait d’aller sur la route. En 2003, j’avais gardé le contact avec le VTT et en 2004, je ne faisais que ça. Mais à l’époque, ce problème de vélo associé à un problème fiscal avait créé une spirale négative qui a fait que je n’ai pas pu préparer les Jeux Olympiques sereinement.

Tu as participé à trois Jeux Olympiques : Atlanta 1996, Sydney 2000 et Athènes 2004. Quelle est l’édition qui t’a le plus marqué ?

Mes premiers Jeux Olympiques sont peut-être ceux qui m’ont le plus marqué : à l’âge de 20 ans, c’était un grand stress et c’était ma découverte des Jeux Olympiques !

Mais quatre ans plus tard, ma victoire reste quand même le summum de toute ma carrière. Tout y était positif. En plus de ma victoire, j’avais eu le temps d’aller voir les autres sports. Et c’était si loin et si beau que ça reste vraiment un agréable moment !

Tu as actuellement 40 ans et tu cours toujours puisque tu as repris ta carrière à l’âge de 37 ans. Pour quelles raisons as-tu repris ta carrière il y a trois ans ? Avais-tu en tête une éventuelle qualification pour les Jeux Olympiques de Rio ?

Je n’avais pas d’idée en tête. J’ai envisagé une qualification pour les JO seulement en fin d’année 2014, quand j’avais fait une très belle saison en étant vice-champion de France.

Le fait de reprendre la compétition était lié à un fait personnel. C’était suite à une agression dont j’avais été victime en voiture en 2012, dans le Sud de la France. On m’avait volé ma voiture et j’avais dû aller un mois à l’hôpital. Je suis passé près de la mort. Suite à cela, dans mon lit d’hôpital, je n’ai pensé qu’à une chose : faire ce que j’avais envie et ne pas avoir peur du ridicule. Comme mon centre de VTT ne marchait pas très bien, j’ai décidé de reprendre la compétition. Je suis revenu en Italie, comme à l’époque, pour être serein et refaire ma passion.

J’avais aussi un goût d’inachevé quand j’avais arrêté à l’âge de 30 ans. J’étais encore en forme pour réussir mais j’avais mis un terme à ma carrière parce que mon ex-femme voulait que je stoppe le vélo, considérant que c’était incompatible avec la famille.

J’ai donc voulu revenir au haut niveau et je me suis fait plaisir. En trois ans, j’ai vécu des émotions très fortes avec des victoires au Roc d’Azur, à la Sea Otter en Californie et en Coupe d’Italie, ainsi que des places dans le Top 10 en Coupes du monde. Je me sens beaucoup plus serein depuis que j’ai réalisé ces performances !

On imagine que tu travailles aussi sur ta reconversion. Peux-tu nous parler de tes activités et projets à part tes propres compétitions ?

Je suis toujours coureur car j’en ai envie. Mon sponsor est chinois et utilise mon image en Chine pour la vente de vélos. Je les aide aussi dans le développement des cadres. En parallèle, je m’occupe d’un des meilleurs Chinois, qui n’a malheureusement pas pu faire les Jeux Olympiques. Il s’est en effet cassé le coude trois mois avant les JO. Je l’entraîne et je le conseille techniquement. Je suis parti plusieurs fois en Chine pour cela. Ça me plaît bien !

Pour l’avenir, le projet est de construire une équipe en France, comprenant des Français et des étrangers. J’en serai le manager et je pense le faire dès 2017. Ça prend du temps !

Merci beaucoup Miguel pour ta disponibilité et bonne chance pour la suite !

La carrière de Miguel Martinez en quelques lignes :

Miguel Martinez remporte la première médaille de sa carrière en 1995 avec l’argent des Championnats du monde de VTT. Lors des Jeux Olympiques d’Atlanta en 1996, il obtient la médaille de bronze. Il continue de s’illustrer avec le classement général de la Coupe du monde en 1997 et une nouvelle médaille d’argent aux Championnats du monde 1999.

En 2000, il atteint le sommet de sa carrière en devenant champion Olympique de VTT à Sydney. Cette même année, il remporte aussi le Championnat du monde et le classement général de la Coupe du monde. En 2002, il commence une carrière sur route dans l’équipe Mapei Quick Step et participe notamment au Tour de France, terminant notamment 8e d’une étape. Il participe de nouveau aux Jeux Olympiques en 2004 à Athènes mais doit abandonner en VTT. Il met un terme à sa carrière en 2006.

A 37 ans, il décide de reprendre sa carrière de VTT. Il termine notamment plusieurs fois dans le Top 10 d’épreuves de Coupe du monde. Aujourd’hui âgé de 40 ans, Miguel Martinez est toujours coureur de haut niveau.

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