Interview de Guillaume Joli
(handball)

Il y a dix ans jour pour jour, Guillaume Joli devenait champion Olympique avec l’Ă©quipe de France. Il nous parle de cette expĂ©rience Olympique ainsi que de ses trois titres de champion du monde et ses deux titres de champion d’Europe.

Guillaume, tu es devenu champion Olympique il y a dix ans Ă  Londres. Dans quel Ă©tat d’esprit es-tu arrivĂ© Ă  cette compĂ©tition, sachant que l’équipe de France Ă©tait championne du monde en titre mais avait ratĂ© son Championnat d’Europe six mois plus tĂ´t ?

On est arrivĂ©s Ă  Londres avec l’idĂ©e d’être conquĂ©rant. On avait vĂ©cu une dĂ©sillusion au mois de janvier en Ă©tant Ă©liminĂ© prĂ©maturĂ©ment de l’Euro. Mais on avait la chance d’avoir une deuxième compĂ©tition dans l’annĂ©e et on avait la ferme volontĂ© de conserver ce titre Olympique. On s’est prĂ©parĂ©s comme des fous pendant un mois et demi pour ĂŞtre prĂŞts au rendez-vous. On arrivait sĂ»rs de nos forces et avec la volontĂ© d’aller au bout !

Lors du premier match des Jeux Olympiques, tu as inscrit 11 buts contre la Grande-Bretagne  et tu as Ă©tĂ© Ă©lu homme du match. On imagine que c’est un très bon souvenir pour ta première Olympique ?

C’est vrai que c’était un peu le rĂŞve ! Ce n’était pas prĂ©vu que je joue autant. Mais comme la rencontre Ă©tait plutĂ´t facile, l’idĂ©e du coach a Ă©tĂ© de prĂ©server les cadres sur ce premier match et de faire tourner l’effectif. J’ai essayĂ© de me mettre en Ă©vidence et d’apporter ma pierre Ă  l’équipe.

Tu as été remplacé dans le groupe par William Accambray à l’issue du premier tour, avant les quarts-de-finale. On imagine que cela a été une situation difficile à gérer ?

Oui, c’était forcĂ©ment une dĂ©ception. Mais Claude (l’entraĂ®neur de l’équipe de France Claude Onesta, ndlr) avait Ă©tĂ© très clair : on partait Ă  quinze pour gagner et William devait ĂŞtre le facteur X. Quand Claude m’a appelĂ© dans sa chambre, je savais qu’il allait m’annoncer ma sortie du groupe. C’était bien sĂ»r une dĂ©ception, mais l’équipe passait avait tout et l’important Ă©tait qu’on soit champions Olympiques. Quand on voit la suite du dĂ©roulĂ© des Ă©vĂ©nements, on ne peut que donner raison au coach ! Et on est tous très heureux de dire qu’on a Ă©tĂ© champions Olympiques !

« Je ne peux que garder des grands souvenirs et des étoiles dans les yeux quand je parle des Jeux Olympiques ! »

Comment s’est passĂ©e la suite de ces Jeux Olympiques de Londres pour toi ?

J’étais en permanence avec le groupe, que ce soit aux entraînements ou aux matchs. On était tous, les quinze joueurs, dans les chambres au Village Olympique. Je me suis échappé deux ou trois fois pour aller voir des autres disciplines. Quand on est handballeur, on joue le premier match le premier jour et la finale est le dernier jour, donc on n’a pas trop le temps de profiter des Jeux Olympiques. Comme j’avais moins cette gestion du stress et des matchs, je me suis permis des sorties pour profiter de l’esprit Olympique.

De façon plus globale, quels souvenirs gardes-tu de ces Jeux Olympiques de Londres ?

C’était exceptionnel ! C’est difficile Ă  expliquer en quelques mots. DĂ©jĂ , c’était un rĂŞve d’enfant qui se concrĂ©tisait. Quand on est petit, on rĂŞve tous des Jeux Olympiques qu’on voit Ă  la tĂ©lĂ© ! Et puis il faut se rendre compte de la dimension des Jeux Olympiques : le rĂ©fectoire devait avoir la taille de deux ou trois terrains de foot accolĂ©s pour que tout le monde puisse manger en mĂŞme temps. Le Village Olympique permet un Ă©change incroyable. On a la chance de pouvoir croiser toutes les nations et tous les plus grands sportifs de toutes les disciplines. C’étaient deux semaines de folie. En plus, on a eu la chance de finir sur cette mĂ©daille d’or. Je ne peux que garder des grands souvenirs et des Ă©toiles dans les yeux quand je parle des Jeux Olympiques !

Tu comptes Ă  ton palmarès un titre Olympique (2012), trois titres de champion du monde (2009, 2011, 2015) et deux titres de champion d’Europe (2010, 2014). Parmi tous ces titres, lequel a Ă©tĂ© le plus difficile Ă  conquĂ©rir selon toi ?

Ils ont tous une histoire particulière. Le titre de 2009 en Croatie n’était pas simple et a Ă©tĂ© long Ă  se dessiner. Celui de 2011 s’est jouĂ© en prolongations et Ă©tait Ă©galement compliquĂ©. Quant Ă  celui de 2010, il a Ă©tĂ© dĂ©crochĂ© après avoir battu les Espagnols en demi-finale grâce Ă  des exploits individuels, alors qu’on Ă©tait derrière tout le long du match. Le titre Olympique a aussi Ă©tĂ© difficile car on a perdu contre les Islandais en match de poule et cela avait tout remis en cause. Chaque titre a Ă©tĂ© compliquĂ© Ă  remporter. Il faut toujours une part de rĂ©ussite pendant les quinze jours de compĂ©tition. Quand on voit actuellement l’équipe de France avec ses joueurs incroyables qui n’arrive pas Ă  gagner chaque compĂ©tition, on se rend compte que ce qu’on a fait Ă©tait exceptionnel !

Comment as-tu vĂ©cu le fait d’être attendu au tournant sur chaque Ă©preuve ?

On avait la chance d’avoir les plus grands joueurs du monde titulaires quasiment sur chaque poste. Cela aidait forcĂ©ment Ă  vivre sereinement les choses. On a rĂ©ussi Ă  se souder autour de l’objectif commun de gagner le plus longtemps possible. On le vivait plutĂ´t bien. Mais on n’était malgrĂ© tout jamais entièrement sereins avant les compĂ©titions. En effet, on n’était jamais complètement prĂŞts quand on finissait les prĂ©parations dĂ©but janvier – ou du moins on avait cette sensation-lĂ . Le fait d’être toujours en alerte nous permettait de nous dĂ©passer dans les moments importants.

« J’aborde vraiment le métier d’entraîneur en toute humilité »

Tu Ă©tais un spĂ©cialiste des jets de 7 mètres. Comment en es-tu devenu un spĂ©cialiste ?

J’ai tiré les jets de 7 mètres depuis tout petit car j’adorais ça. Mon père entraînait l’équipe senior. Comme il n’y a pas de confrontation physique sur les penalties, j’avais la possibilité de les tirer et de m’entraîner contre les grands. Cela me permettait de marquer plus de buts quand j’étais jeune. On me les a fait tirer tout au long de ma carrière. On m’a aussi laissé cette mission en équipe de France car j’étais en réussite dans mon club de Chambéry.

Peux-tu nous parler de ta prĂ©paration pour les jets de 7 mètres ?

J’ai un peu tout essayĂ©. J’ai fait de la prĂ©paration mentale. J’ai aussi fait de la vidĂ©o en regardant les gardiens. Chacun a sa prĂ©paration mais je pense que c’est surtout beaucoup de travail ! C’est la rĂ©pĂ©tition tous les jours Ă  l’entraĂ®nement qui permet de gagner en stabilitĂ© dans les performances.

Tu as mis un terme Ă  ta carrière en 2019 et tu es actuellement entraĂ®neur de l’équipe de France des U17. Devenir entraĂ®neur Ă©tait-il une idĂ©e depuis longtemps ?

J’y ai pensé tout au long de ma carrière car c’est quelque chose que j’aime. Cela s’est précisé en fin de carrière, quand j’ai organisé des stages pour les jeunes afin de rendre un peu ce que j’avais eu la chance d’avoir à leurs âges. Mon père est lui-même entraîneur depuis longtemps et cela a aussi peut-être influé dans ma façon d’être et de vivre les choses. Je me suis formé pour que je puisse basculer et entraîner dès la fin de ma carrière. J’avais cette volonté de transmettre aux plus jeunes l’expérience que j’avais reçue tout au long de ma carrière.

J’aborde vraiment le mĂ©tier d’entraĂ®neur en toute humilitĂ©. Cela ne fait que trois ans que je l’exerce. L’avantage en tant qu’ancien sportif de haut-niveau, c’est que j’ai vĂ©cu des Ă©motions que d’autres n’ont pas vĂ©cues. Mais il y a beaucoup d’autres rouages Ă  travailler. Je continue Ă  apprendre mon mĂ©tier pour que les jeunes puissent continuer Ă  aller vers le haut-niveau !

Merci beaucoup Guillaume et bonne continuation en tant qu’entraîneur !

Crédits photos : S. Pillaud / FF Handball (photo 1) et AFP (photo 2)

La carrière de Guillaume Joli en quelques lignes :

Evoluant au poste d’ailier droit, Guillaume Joli connaît sa première sélection en équipe de France en 2006. Il devient champion du monde en 2009, champion d’Europe en 2010 puis de nouveau champion du monde en 2011. Lors des Jeux Olympiques de Londres 2012, il remporte la médaille d’or. Il décroche ensuite les titres de champion d’Europe en 2014 et de champion du monde en 2015.

En club, il joue successivement pour Villeurbanne, Chambéry (vice-champion de France 2006, 2008, 2009, 2010), Valladolid (Espagne), Dunkerque (vice-champion de France 2013, vainqueur de la Coupe de la Ligue 2013, champion de France 2014), Wetzlar (Allemagne) puis de nouveau Dunkerque. Il termine meilleur buteur du Championnat de France lors de la saison 2004-2005.

Il met un terme à sa carrière en 2019. Aujourd’hui âgé de 37 ans, Guillaume Joli est entraîneur de l’équipe de France des U17.

drapeau olympique Participation aux Jeux Olympiques de Londres 2012

medaille Médaillé d’or aux Jeux Olympiques de Londres 2012 (handball)

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